samedi 6 février 2010


Analyse d'une lecture abandonnée.

J'ai tout de même poussé le masochisme jusqu'aux trois quarts de ce livre. Attirée par un sujet qui me tient particulièrement à cœur, j'aurais dû me méfier davantage de la quatrième de couverture qui claironnait : « Une comédie à l'anglaise, tendre et humaine, pour en finir avec la crise ! ».

Dans Six pieds sous terre, Ray French met en scène Aidan Walsh, un homme ordinaire qui, apprenant qu'il sera bientôt licencié pour cause de délocalisation, décide de s'enterrer vivant au fond de son jardin pour mettre le patron de l'entreprise Sunny Jim Electronics au pied du mur.

« Dernier élément d'une espèce menacée : un employé qui croyait avoir des droits ! »

Certes, l'idée de mettre en avant la révolte d'un ouvrier non qualifié contre une multinationale tentaculaire avait de grandes chances de plaire au vu de l'actualité sociale. Démagogie quand tu nous tiens ! En ce sens, le discours est on ne peut plus simplifié, pour une adhésion optimum, on a un méchant et un gentil, ça ne demande pas trop de réflexion et en plus c'est rigolo. L'humour du livre lui-même ne demande d'ailleurs pas trop d'effort car on peut le résumer au style « pipi-caca-prout ». Que penser ?

Le contexte est à peine ébauché, comme si la condition ouvrière était une évidence pour tout le monde. La psychologie des personnages est survolée comme si au fond il n'y avait pas grand chose à en dire. Les dialogues sont d'une platitude sidérante. L'auteur ne cesse de s'enliser dans les clichés attachés au milieu prolétaire. Alors ?

Au bout de 262 pages, je me suis rendue à l'évidence : Monsieur French n'a aucun talent pour développer des idées, donner corps aux personnages, innover dans l'approche que l'on peut avoir du monde ouvrier, saupoudrer son récit d'un humour drôle et constructif.
Les éditions 10/18 devraient penser à offrir avec ce titre un enregistrement de rires, propre aux sitcoms, à écouter simultanément !
Bref, Monsieur French peut au moins être satisfait d'avoir produit un roman idéalement conçu pour être adapté au cinéma en une comédie dont on se réjouit d'avance !

Mais quelle image ce livre laisse-t-il donc des « prolos » ?

Six pieds sous terre aura manqué clairement et cruellement de profondeur et stagne, en ce qui me concerne, au ras des pâquerettes.

(Janvier 2010)

 Ray French, Six pieds sous terre, 10/18, 2009, 416 pages

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