vendredi 12 août 2011


Le vieux loup borgne du zoo ne comprend pas ce que signifie cette mascarade. Faisant les cent pas dans son lugubre enclos revêtu d’un simple rocher gris et d’un arbre mort, il se demande pourquoi cet enfant reste planté devant son grillage « immobile comme un arbre gelé ». Grâce à sa patience et à sa sensibilité, l’enfant finit par gagner la confiance du vieux loup bleu d’Alaska. S’ensuit un face à face prolongé et muet, œil dans l’œil, entre le petit africain et l’animal, qui les entraîne chacun leur tour dans les souvenirs de l’autre.
« La pupille a beau grossir, envahir l’œil tout entier, brûler comme un véritable incendie, le garçon ne détourne pas son regard. Et c’est quand tout est devenu noir, absolument noir, qu’il découvre ce que personne n’a jamais vu avant lui dans l’œil du loup : la pupille est vivante. »
J’ai adoré ce petit livre dans lequel les deux protagonistes acceptent de recevoir la confidence du lourd passé de l’autre comme un cadeau inaugurant leur amitié nouvelle. La structure narrative illustre parfaitement l’évolution de cette relation entre le petit garçon et le loup. En effet, nous avons deux histoires enchâssées dans le récit cadre qui finissent par fusionner à la fin du roman. Ainsi, on constate que chacun écoute l’autre avec respect, l’histoire du loup et celle du garçon étant de longueur équivalente, pour ensuite se rejoindre dans un dénouement inattendu et poignant qui représente une reconnaissance mutuelle.
Il faut aussi évoquer la très belle plume de Daniel Pennac. Des images enchanteresses. Et puis le dynamisme palpable de ce texte. Des phrases souvent concises, des retours à la ligne, qui servent cette impression de grande vitalité, comme les bonds d’un louveteau dans la neige, avançant avec enthousiasme dans l’existence même si le danger se fait parfois trop familier.
Il y a en effet beaucoup de thèmes sérieux abordés dans ce court roman : la captivité des animaux, le poids des souvenirs, l’immigration, les conséquences des actes de l’homme sur la vie sauvage (la chasse au plus beau spécimen pour sa fourrure ou pour l’exposer dans un zoo) et sur ses semblables (la guerre qui laisse les enfants orphelins), mais aussi l’amitié qui est un sujet très sérieux au regard des bienfaits qu’elle peut procurer. Et tout ceci nous est conté avec un tel talent : l’auteur a su donner du poids à cette histoire tout en lui offrant un caractère merveilleux. C’est assurément une belle réussite et un incontournable de la littérature jeunesse.
« Le soleil choisit juste ce moment pour percer les nuages. Un rayon tomba sur Paillette et tout le monde détourna les yeux. Elle était réellement éblouissante ! Une louve d’or, vraiment, avec une truffe noire au bout du museau. Si noire, la truffe, dans tout cet or, que ça la faisait un peu loucher. »

Daniel Pennac, L'oeil du loup, Pocket jeunesse, 2002, 96 pages

1 commentaire:

  1. mon fils l'avait lu au collège, je l'ai moi aussi lu, j'ai adoré

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